David et Manu Bourdelet, agriculteurs dans le sud-ouest de la Marne, ont lancé leur entreprise de chips locales en 2019. Le succès a rapidement été au rendez-vous. Mais face à la crise sanitaire et à la baisse des ventes, ils ont dû adapter leur stratégie commerciale.
Comment continuer à vendre des chips, produit convivial et festif, à l'heure des gestes barrières ? C'est l'équation que doivent résoudre Manu et David Bourdelet, jeunes producteurs de chips dans la Marne : "Le confinement et l'été se sont bien passés pour nous. Mais depuis fin août, on commence à sentir la frilosité des consommateurs."
En mars 2019, ces cultivateurs de pommes de terre créent une entreprise de production de chips locales : Thaas Chips, du nom de leur village d'origine, au sud de Sézanne dans la Marne. Les deux agriculteurs misent sur les circuits courts, un produit traditionnel et une communication audacieuse. Les ventes décollent rapidement. "Notre boîte a eu un super démarrage, notre message a été bien reçu par les consommateurs et on a réussi à s'implanter dans de nombreux points de vente de la région," se remémore Manu.
Comme pour beaucoup d'entrepreneurs, la crise du Covid vient perturber cet heureux scénario, tout juste un an après le lancement de Thaas Chips. Au départ pourtant, le ralentissement redouté ne se produit pas : "Nous n'avons pas ressenti la crise tout de suite. Nous travaillons avec des réseaux courts de distribution comme la Ruche qui dit Oui ou Locavor, détaille Manu Bourdelet. Et pendant le confinement, les gens se sont justement davantage tournés vers ces circuits là, avec l'envie de mieux consommer."
Manque de visibilité
Les ventes progressent et se maintiennent pendant toute la période estivale. "Nous avons de la chance, la chips est un produit saisonnier, on la mange pendant les barbecues l'été. Pendant cette période, on sortait 200 kilos de chips par jour. Mais en ce début d'automne 2020, on tourne plus autour de 80 kilos par jour. Notre produit marche mais aujourd'hui, on manque cruellement de visibilité et on a du mal à le développer," analyse Manu, en charge du volet commercial de l'entreprise.Pour faire connaître leurs produits, les deux frères misent d'habitude sur les salons et les foires. Ces lieux d'échange leur permettent de démarcher de nouveaux clients. Mais les annulations en série de ces événements plombent leur stratégie commerciale en cette rentrée. Dernière en date : la foire de Châlons-en-Champagne, deuxième plus gros salon agricole de France, qui aurait dû se tenir du 4 au 14 septembre. "C'est de la visibilité en moins pour nous, on a un partenariat avec eux : normalement, on va sur scène, avec notre mascotte, Chipette, et on lance des paquets de chips. C'est une bonne manière de faire connaître notre marque," confie Manu.
Autre animation en suspens : les dégustations dans les supermarchés. "Vous plongeriez votre main dans un bol de chips au milieu d'un rayon, vous ? Moi, non, concède Manu, lucide. Mais pour une jeune marque comme la nôtre, faire goûter nos produits est un passage obligé si on veut se faire connaître."
Adapter la stratégie commerciale
Pour ne pas freiner le développement de leur entreprise locale, Manu et David Bourdelet ont donc dû revoir toute leur méthodes de vente. Ils travaillent en partenariat avec Taktik, une société troyenne de communication. Ensemble, ils ont réflechi à l'élaboration d'échantillons à distribuer gratuitement.Comme nous ne pouvons plus proposer des bols de dégustation, on fait des petits sachets de 10-15 grammes que l'on distribue dans les grandes surfaces.
Les deux frères misent aussi sur la communication digitale. Ils développent leurs réseaux sociaux et pratiquent le "co-branding" : en collaborant avec d'autres marques, ils renforcent leur présence sur internet. Récemment, ils ont ainsi développé une gamme de chips au vinaigre avec le célèbre producteur marnais, Clovis.
Mais la meilleure stratégie que Manu et David Bourdelet souhaitent nourrir, c'est de cultiver un lien direct avec les consommateurs. Les chips, ça se goûte et mieux encore, au pied des champs de pommes de terre. Les deux frères achèvent tout juste les travaux d'une nouvelle unité de production : "Ce bâtiment nous permettra de produire un rendement quatre fois supérieur à celui d'aujourd'hui. Surtout, il sera ouvert à la visite. On veut que les gens viennent à notre rencontre pour découvrir notre produit. Il faut qu'on prépare l'avenir, on garde la patate," conclut Manu, confiant.